Équilibre

Notre corps est sans cesse à la recherche de l’équilibre acido-basique (homéostasie du pH).

Le pH (potentiel Hydrogène) est l’unité de mesure de l’acidité ou de l’alcalinité d’une substance. L’échelle de mesure de l’acidité est située entre 0 pH acide, 7 pH neutre et 14 pH alcalin ou basique.

Le pH est différent selon les parties du corps. Ainsi, le pH de la peau est d’environ 5.2, le pH du tube digestif varie selon les organes, mais l’estomac est le plus acide (environ 2). En revanche, le pH sanguin est vital et ne peut que très peu varier puisqu’il doit être entre 7.38 et 7.42. En effet, en dehors de ces limites, la vie ne serait pas possible.

Pour maintenir l’équilibre du pH sanguin, l’organisme dispose de deux « systèmes compensatoires » : la respiration (ventilation pulmonaire) et les reins (urine). Ceux-ci agissent comme des régulateurs en neutralisant un excès d’acides ou de bases.

De manière générale, durant la journée (phase diurne), nous assimilons des acides, bien qu’une partie soit éliminée par la respiration (acides volatils), certains acides (dits non-volatils) se fixent dans le mésenchyme (tissu présent dans les muscles, le squelette ou encore le cartilage). Cette accumulation d’acide rigidifie le mésenchyme. Durant la nuit (phase nocturne), nous éliminons les acides par voie rénale. Le mésenchyme retrouve alors une forme plus liquide.

Cependant, lorsque ces systèmes compensatoires ne parviennent plus à éliminer suffisamment d’acides, les os, qui sont les principaux réservoirs de bases du corps, vont libérer dans la circulation sanguine des bases. En effet, les os sont essentiellement composés de calcium et les sels de calcium peuvent être rapidement utilisés pour tamponner les acides en excès.

C’est également ce dernier point qui entre en contradiction avec la consommation de produits laitiers pour renforcer nos os. En effet, les laitages sont très acidifiants (surtout les fromages). Ainsi, le calcium apporté par les produits laitiers servirait à tamponner l’acidité et ne serait pas utilisé pour renforcer les os. Une méta-analyse de 2019 arrive à la conclusion qu’une plus grande consommation de produits laitiers ne diminuait pas le risque d’ostéoporose ni de fractures de la hanche.

Acides et bases

Chaque aliment apporte dans le sang et dans le liquide extracellulaire des acides et des bases. En règle générale le pouvoir acidifiant ou basifiant d’un aliment dépendra de :

  • la qualité et de la quantité de minéraux qu’il renferme. Certains minéraux sont acidifiants, d’autres basifiants (voir ci-dessous) ;
  • sa teneur en citrates et bicarbonates (souvent liés au potassium), plus il y en a plus l’aliment est basifiant ;
  • sa teneur en protéines et la part des acides aminés soufrés dans ces protéines, plus il y en a plus l’aliment est acidifiant.

Le goût acide d’un aliment, comme le citron, n’est pas forcément révélateur de son pouvoir acidifiant.

Lorsqu’il y a un excès d’acides on parle d’acidose et lorsqu’il y a un excès de bases d’alcalose. Dans les deux cas un excès n’est pas bon, puisqu’il faut un équilibre pour notre pH sanguin. Cependant, on parle plus souvent d’acidose ou d’excès d’acidité car il est beaucoup plus fréquent notamment en raison de notre mode de vie (voir plus bas). 

Il existe deux types d’acidoses ou d’alcaloses :

  1. Acidose ou alcalose métabolique : causé par un déséquilibre de la production d’acides ou de bases et de leur excrétion rénale.
  2. Acidose ou alcalose respiratoire : causé par des variations de l’expiration du dioxyde de carbone dues à des troubles pulmonaires ou respiratoires.

Acides

Ce sont les aliments dits « acidifiants » ou « producteurs d’acides ». Ils génèrent plus d’acides que de bases. On retrouve principalement toutes les protéines animales : viandes, poissons, œufs et produits laitiers ainsi que les céréales. Certains minéraux sont également « acidifiants » :

  • Chlore (Cl) présent dans le sel de table (production d’acide chlorhydrique) ;
  • Soufre (S) présent dans les protéines céréalières (production d’acide sulfurique) ;
  • Phosphore (P) présent dans les aliments d’origine animale (production d’acide phosphorique).

Ce sont des acides non-volatils puisqu’ils doivent être éliminés par les reins.

Bases

Ce sont les aliments dits « basifiants » ou « alcalinisants ». Ils génèrent plus de bases que d’acides. On retrouve principalement les végétaux surtout les légumes et les fruits. A l’instar des acides, certains minéraux sont « basifiants » :

  • Potassium (K) présent dans les végétaux ;
  • Calcium (Ca) présent dans les oléagineux et les végétaux ;
  • Magnésium (Mg) présent dans les oléagineux et les végétaux ;
  • Sodium (Na) présent dans les végétaux.

Les facteurs acidifiants

De nos jours, l’acidose chronique est fréquente en raison de notre mode de vie et de notre alimentation trop acidifiante.

Mode de vie

L’hygiène de vie joue un rôle important dans le cadre de l’équilibre acido-basique. Les points suivants (non exhaustifs) contribuent à l’acidification :

  • le stress ;
  • la pollution de l’air ;
  • le tabac et l’alcool ;
  • la sédentarité ;
  • le sport à outrance ;
  • certains médicaments (anti-inflammatoires et anti-douleurs) ;
  • le manque de sommeil et/ou les insomnies ;
  • les médicaments comme les IPP (inhibiteur de pompes à proton), car ils bloquent l’acide chlorhydrique essentiel à la digestion.

Alimentation

Dans le cadre de l’alimentation, les aliments ou groupes d’aliments suivants augmentent l’acidification de notre corps :

  • les céréales et les dérivés ;
  • les farines blanches et les dérivés ;
  • la plupart des produits raffinés et transformés ;
  • les graisses durcies. Il s’agit de graisses végétales durcies chimiquement (hydrogénées ou partiellement hydrogénées). Ce sont les graisses trans, comme les margarines. Plus d’informations sur les graisses dans l’article « Les lipides, la grâce des graisses« ) ;
  • le thé, l’alcool, le café, le chocolat ;
  • les bouillons, surtout industriels ;
  • les protéines animales : viandes (sous toutes les formes), poissons, blancs d’œuf et produits laitiers ;
  • les légumes secs (légumineuses) : lentilles, pois, haricots blancs, etc.
  • les arachides (cacahuètes) ;
  • certains légumes : asperges, artichauts, choux de Bruxelles ;
  • la consommation de smoothies en excès, car la grande quantité de fruits et légumes à digérer s’oxyde et engendre de l’acidité.

Un régime acidifiant abaisse le pH sanguin dans des normes basses. De plus, si les valeurs de bicarbonate plasmatique sont également basses on parle d’acidose métabolique ou de bas grade. Cette dernière s’accentue avec l’âge, car la fonction rénale diminue. Ce déclin de la fonction rénale, même sans insuffisance rénale, augmente les risques pour la santé osseuse, rénale, musculaire et cardiovasculaire. Il est donc important d’avoir une alimentation basifiante pour les personnes âgées.

Dans certains cas d’alcalose métabolique, comme pour le syndrome de Gitelman, risque de calcul rénal à base de phosphates de calcium, une alimentation acidifiante pourrait être recommandée par un médecin.

Indice PRAL

Pour connaître le potentiel acide d’un aliment, on se base sur l’indice PRAL (Potential Renal Acid Load ou charge rénale acide potentielle). Cet indice évalue la quantité d’éléments acides (charge acide) qu’un aliment produit dans les urines. Dans les détails on évalue la charge acide d’un aliment grâce :

  • A son coefficient d’absorption intestinale et à sa quantité de minéraux acides par rapport aux minéraux basiques pour 100 g.
  • A la quantité de protéines pour évaluer l’excrétion moyenne en sulfates sur la base d’une teneur moyenne en méthionine de 2.4% et en cystéine de 2% (tous deux sont des acides aminés soufrés).
  • Au final, plus le nombre est positif (supérieur à zéro) plus l’aliment est considéré comme acidifiant. A l’inverse, plus le nombre est négatif (inférieur à zéro) plus l’aliment est considéré comme alcalinisant et s’il est de zéro, l’aliment est neutre.
L’indice PRAL ne reflète cependant pas toujours la réalité, car il ne tient pas compte de la teneur en bicarbonates et citrates en supposant que ceux-ci sont liés au potassium. De plus, la quantité en acides aminés soufrés dans les protéines est une moyenne.

Mesurer le pH

Analyse sanguine

On mesure le pH et le taux de dioxyde de carbone (acide) et de bicarbonate (base) d’un échantillon de sang artériel, car le sang veineux n’est généralement pas fiable.

pH urinaire 

Pour conserver un équilibre entre acides et bases, le corps « évacue » une partie des acides ou des bases excédentaires via les reins. Ainsi, la mesure du pH urinaire est souvent utilisée comme indice pour évaluer le taux normal d’excrétion des acides par les reins. Les urines ayant un pH qui se situe entre 6.5 et 7.5 sont considérées comme normales. Ainsi un pH urinaire en-dessous de 6.5 peut indiquer que l’organisme est acide et qu’il cherche à se débarrasser de ce surplus.

Pour mesurer le pH urinaire, on utilise des papiers réactifs généralement disponibles, parfois gratuitement, en pharmacie. Il faut uriner sur une bandelette, celle-ci change de couleur en fonction du pH de l’urine. Une échelle de couleur avec la correspondance du pH est remise avec les papiers, il suffit de comparer la couleur de la bandelette avec l’échelle pour obtenir le pH de son urine.

Protocole

Faites trois mesures par jour pendant cinq jours :

  1. Deuxième urine du matin (JAMAIS sur la première urine. Elle est toujours acide, car elle contient tous les acides filtrés par les reins et accumulés au cours de la nuit) ;
  2. Avant le repas du midi ;
  3. Avant le repas du soir.

Additionnez tous les résultats de pH et divisez-le par le nombre de mesures. Si le pH moyen est inférieur à 6.5 cela indique un excès d’acide dans l’organisme.

Un pH urinaire acide n’est pas toujours signe d’un excès d’acides dans l’organisme. Il peut également indiquer la capacité des reins à éliminer l’acidité. Cette valeur n’est donc pas toujours fiable et c’est pour cette raison qu’il est notamment important d’observer les symptômes liés à un excès d’acides dans l’organisme.

Quels sont les symptômes et les risques d’un excès d’acidité ?

Si les systèmes compensatoires (respiration pulmonaire et reins) et tampons (os) ne parviennent plus à éliminer suffisamment l’excès d’acides ou de bases cela peut engendrer des problèmes cardiaques ou un coma. Mais avant cela d’autres symptômes sont généralement déclarés. 

Les symptômes

Il y a de nombreux symptômes, tous ne sont pas forcément visibles cela dépend notamment de chacun. Voici une liste non exhaustive :

  • Fatigue chronique, manque d’entrain et somnolence ;
  • Réveil entre 1h et 3h du matin, souvent accompagné de cauchemars ;
  • Pathologie inflammatoire (digestives, musculaires, ORL) ;
  • Troubles ou pathologies digestives ;
  • Troubles cutanés (peau grasse, acné, eczéma, rougeur, démangeaison, sécheresse, gencives sensibles et/ou enflammées, etc.). Comme la peau est un émonctoire, l’excès d’acidité sortira notamment par cet organe ;
  • Mains moites et froides (sueurs froides) ;
  • Faible résistance au froid ;
  • Migraines ;
  • Essoufflement car les cellules peinent à être oxygénées ;
  • Caries, les dents sont essentiellement faites de calcium, comme l’acidité chronique engendre la libération du calcium pour rétablir l’équilibre, les dents sont fragilisées ;
  • Mauvaise haleine et langue chargée ;
  • Troubles du système immunitaire (infections chroniques) ;
  • Douleurs dorsales : sciatique, lumbago, torticolis ;
  • Dommages accélérés par les radicaux libres (vieillissement prématuré) ;
  • Ostéoporose, os faibles et fragiles, fractures de la hanche, épines osseuses ;
  • Douleurs articulaires, douleurs musculaires (crampes) et accumulation d’acide lactique (mauvaise récupération sportive). Le mésenchyme ne parvient plus à retrouver sa forme liquide initiale et se rigidifie provoquant des douleurs articulaires et musculaires.

Les risques

Le corps va tout faire pour maintenir un équilibre acido-basique. Un excès chronique d’acidité augmente les risques d’ostéoporose (déminéralisation osseuse), de maladies rénales (insuffisance rénale), de maladies cardiovasculaires, de résistance à l’insuline, de fatigue chronique, de pathologies digestives, de migraines, d’inflammation ou encore de fonte musculaire (sarcopénie).

Comment équilibrer les acides et les bases dans votre organisme ?

Premièrement en évitant tous les facteurs acidifiants énoncés plus haut. Mais trois points sont essentiels :

Activité physique

L’exercice physique, surtout en plein air, accélère le rythme respiratoire ce qui permet une meilleure élimination des acides volatils. De plus, l’exercice stimule la diurèse ainsi une partie des acides non-volatils seront également éliminés par les urines. Attention tout de même car le sport à outrance aura l’effet inverse, sans compter le risque de déshydratation.

Les sportifs devraient prêter une grande importance à l’équilibre acido-basique, car un excès d’acidité est souvent la cause de douleurs musculaires et de tendinopathies. Un bon équilibre permet d’améliorer la récupération et prévenir les blessures.

Alimentation

L’alimentation est la principale source de bases et d’acides qui doit permettre de maintenir l’équilibre. Il est donc important de privilégier les aliments bruts aux aliments industriels. Voici une liste non exhaustive d’aliments basifiants :

  • Tous les légumes (sauf asperge, artichaut et chou de Bruxelles) ;
  • Tous les fruits ;
  • Les abricots et figues secs ;
  • Les haricots verts ;
  • Certains jus non sucré (citron, tomate, orange, pomme, et raisin) ;
  • Les épices (curcuma, cumin, cannelle, clou de girofle, etc.) ;
  • Les herbes aromatiques ;
  • Les champignons ;
  • Le quinoa ;
  • Les patates douces et les pommes de terre.

L’eau est également essentielle pour rétablir l’équilibre acido-basique et doit être privilégiée aux thés, cafés, tisanes ou infusions car ceux-ci contiennent des nutriments qui devront également être filtrés par les reins, ce qui leur donnera un travail supplémentaire.

Cependant, il est inutile de prendre des eaux minérales riches en minéraux, car les sels minéraux présents sont inorganiques. Ils peuvent diminuer l’absorption d’autres minéraux apportés par l’alimentation, ils ne sont pas assimilés par l’organisme et devront être évacués par les reins. Il est donc préférable de choisir des eaux peu minéralisées dont le résidu à sec (après évaporation) doit être inférieur à 100 mg/l. Il est, en général, indiqué après les valeurs nutritionnelles de la bouteille avec les mentions : « résidus à sec à 180° », « extrait sec à 180° », « teneur total en sels minéraux à 180° ». Voici trois eaux faibles en minéraux : Mont Blanc (105 mg/l), Rosée de la Reine (27 mg/l), Mont Roucous (22 mg/l).

Sommeil

Durant le sommeil, il n’y a plus d’apport alimentaire, le corps peut donc se reposer et se « réparer ». Les acides contenus dans le mésenchyme (voir plus haut) vont être libérés et éliminés par les reins, c’est notamment pour cette raison que la première urine du matin est très acide.

Références :

Anthony Sebastian, Lynda A, Frassetto Deborah E, Sellmeyer Renée L, Merriam R, Curtis Morris, Jr, Estimation of the net acid load of the diet of ancestral preagricultural Homo sapiens and their hominid ancestors, 2002, https://academic.oup.com/ajcn/article/76/6/1308/4689578

Lanutrition.fr, L’indice PRAL : sachez le comprendre pour l’utiliser, 2018, https://www.lanutrition.fr/bien-dans-son-assiette/le-potentiel-sante-des-aliments/aliments-acidifiants-et-basifiants/lindice-pral-sachez-le-comprendre-pour-lutiliser

Huffman FG, Vaccaro JA, Zarini GG, Vieira ER., Consumption of milk and dairy products and risk of osteoporosis and hip fracture: a systematic review and Meta-analysis, https://www.tandfonline.com/doi/abs/10.1080/10408398.2019.1590800?journalCode=bfsn20

Dr. Frédéric Maton, L’équilibre acido-basique du sportif conditionne la performance, 2017, https://www.irbms.com/equilibre-acido-basique/

Anthony Berthou, Hydratation à l’effort : pourriez-vous mourir à vouloir trop bien faire ?, 2018, http://www.sante-et-nutrition.com/hydratation-effort/